dimanche 6 juin 2010

Droits dans leurs bottes

Comme un seul homme, la majorité municipale a donc choisi de s'asseoir sur le rapport du commissaire-enquêteur concernant la rénovation des Hauts-de-Joinville. Une décision maladroite d'un point de vue politique et explosive d'un point de vue juridique...


Conseil municipal du 31 mai dernier. Deux délibérations importantes étaient à l'ordre du jour : "Approbation de la modification du Plan local d'urbanisme" (point 17) et "Procédure de déclaration d'utilité publique sur l'opération de la ZAC - Non renoncement de l'opération et déclaration de projet" (point 18).

A 20 h 50, M. le maire a ostensiblement quitté la salle, suivi peu après par Alain Barugel, conseiller municipal de la majorité. Présidence de la séance assurée par Chantal Durand, adjointe au maire, qui a joué comme elle a pu les fantômes de M. Dosne.

Jean-Jacques Gressier, un autre adjoint au maire, a pris la parole pour  expliquer la position de l'équipe municipale sur le dossier des Hauts-de-Joinville.

Finasseries
 
On s'en souvient (sinon, voir ici), le commissaire-enquêteur avait demandé dans son rapport que la hauteur des nouveaux immeubles soit revue à la baisse ; que l'immeuble du 34 rue de Paris soit rénové et celui du 36, reconstruit ; que la participation de l'aménageur  au financement soit augmentée. Ces trois dernières conditions étaient suspensives.

L'équipe d'Olivier Dosne a pris le parti de finasser. Elle accepte volontiers de baisser la hauteur des nouveaux immeubles. Mais elle interprète a minima la demande de rénovation du 34 rue de Paris, dans lequel M. Barugel a des intérêts : il s'agira simplement de ravaler la façade de l'immeuble (et aux frais du contribuable Joinvillais, s'il vous plaît...).

En ce qui concerne le 36 rue de Paris autrement dit la pharmacie du maire et la participation de l'aménageur, le commissaire-enquêteur et, surtout, les Joinvillais qui se sont exprimés, sont priés d'aller voir ailleurs si le maire y est. Et ça tombe bien : il n'était justement pas dans la salle. Enfin, pas physiquement...

Jean-Jacques Gressier s'est employé à démolir la crédibilité du commissaire-enquêteur. Dans un exposé lourd, interminable et confus, il a tenté de démontrer que sa conception de la densification ne tenait pas la route. Entre autres amabilités, il a aussi argué que sa demande de reconstruction du 36 rue de Paris était une aberration architecturale, d'un point de vue simplement technique.

Mais ce qui justifiait, au fond, la position de l'équipe municipale a été  naïvement brillamment énoncé par Francis Sellam, conseiller-municipal de la majorité. "Le commissaire-enquêteur ne représente qu'une infime partie des Joinvillais", a-t-il asséné, se gardant bien de fournir à l'assistance dubitative les sondages qui lui permettaient d'étayer une telle énormité.

Opposition unanime 

Marc Verstraete, conseiller municipal d'opposition (Parti des radicaux de gauche), a dénoncé avec vigueur "la désinvolture" de l'équipe municipale. Selon lui, "il est déraisonnable de ne pas tenir compte des conclusions du commissaire-enquêteur". "Vous massacrez ce rapport !", s'est-il étranglé, au bord de l'apoplexie...

Olivier Aubry (opposition, UMP) a, quant à lui, regretté que la mairie n'ait pas jugé bon de mettre en ligne ce rapport "quand on sait à quel point la population s'est mobilisée durant l'enquête publique". Ironisant sur l'argumentation des Dosnistes, il a noté que "l'opposition compte un élu supplémentaire : le commissaire-enquêteur"...

Sylvie Mercier (opposition, UMP) a eu beau jeu de relever une inconséquence du discours de Jean-Jacques Gressier. En effet, alors que celui-ci a combattu la conception de la densification défendue par le commissaire-enquêteur, il n' a rien trouvé de mieux que d'accepter de baisser la hauteur des nouveaux immeubles ! C'est même la seule vraie concession faite par l'équipe municipale.

Yves Thamet (opposition, Parti communiste) en a appelé au respect que chacun doit avoir des procédures d'enquête que "la République met en œuvre". Et Benoît Willot (opposition, Parti socialiste), enfin, a demandé un référendum sur cette question des Haut-de-Joinville.

Volonté de la population

Tous ces arguments n'ont évidemment servi à rien. Démentant, comme à l'accoutumée, l'adage selon lequel un homme averti en vaut deux, la majorité municipale a voté la résolution préparée en haut lieu. Depuis lundi soir, donc, l'avis du commissaire-enquêteur est devenu défavorable. A priori, plus aucune expropriation n'est possible et autant dire que le projet de rénovation des Hauts-de-Joinville bat sérieusement de l'aile.

"Le préfet n'est pas lié par l'avis du commissaire-enquêteur", s'est réjoui Jean-Jacques Gressier, qui compte visiblement sur la mansuétude du plus haut représentant de l'Etat dans le département.

Celui-ci a effectivement le droit de passer outre l'expression de la volonté de la population. Mais cela ouvrirait la voie à un règlement judiciaire de l'affaire qui, au mieux, retarderait encore le début des travaux.

Tout le monde s'accorde à reconnaître que le projet de rénovation des Hauts-de-Joinville est une nécessité. Beaucoup d'argent a déjà été dépensé en études diverses et variées. Si un tribunal confirmait le point de vue du commissaire-enquêteur, la ville serait contrainte de dédommager l'aménageur... La majorité municipale a donné lundi soir un bel exemple de ce que l'on peut appeler la politique du pire.










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